lundi 9 octobre 2006

PHILÉMON L'AVALÉ

La roue vient de s'enclencher. Ce poème est le requiem du Luc Pelletier qui existait jusqu'à ce 6 mars 2002. Le Big Bang de l'absurde éclate des tréfonds de mon inconscient pour émerger dans sa pleine force au bout de mes doigts.

La fatalité du vide, après des semaines passées sous les eaux tumultueuses de ma vie intérieure, coupe en deux ce qui reste de moi. D'un côté: la naïveté de la jeunesse que je laisse reposer au fond de l'océan. De l'autre: un esprit en déroute, fracassé par l'incompréhension toujours plus présente du monde qui l'entoure, des fragments arrivant à peine à se recoller pour former un être. C'est la naissance d'une Chose. La machine, le 6 mars 2002, avale enfin cette nuisance insipide qui était le jeune étudiant en mal de vivre. Un mur de béton de 7 mètres d'épaisseur s'érige autour de la Chose, pas encore tout à fait définie. Son évolution prendra part tout au long de mon troisième volet (teinté d'un humour noir encore jamais vu sur ce blog et d'une conscience plus poussée et acérée du monde qui m'entoure), qui débutera juste après ce poème-ci, pour enfin Exister de la façon la plus étrange dans mon quatrième et avant-dernier volet que je baptise ce soir le "Festin Nu des Résidents Errants". Pourquoi ce nom? Ça a été un époque baignée de William S. Burroughs et des Residents, groupe californien avant-gardiste complètement pété.

Enfin, j'en reparlerai le moment venu... Je pense qu'il est temps d'en finir avec l'Autre-d'Avant.


Sourd aux échos frappés de grognements
Aveugle au plus petit sourire d’un enfant
Tournant seul au son de sa propre mélodie solitaire
Muet devant l’acte manqué d’une naissance précoce
Surpris toujours du silence apprivoisé des morts
Il devine toutefois les vapeurs matinales de la ville
Réveillée par un cri
Celui du bateau aux vagues contours
Sur une mer lignée de courbatures
Trompette sonore rivalisant un vieux
Se mouchant
Et les muqueuses de se gonfler sans exploser
Pour ensuite vomir le spectre d’une vie

Il monte et monte et monte et monte
Sans jamais
Derrière
Jeter un regard dégénéré
Aliéné qu’il est par toute cette envie de dormir
Sans repos
Assailli de cauchemars de guerres
De morts
De bombes atomiques
De femmes violées
D’enfants oubliés dans les abattoirs à porcs
De cannibales rockers se masturbant sur un clochard
Cauchemars du temps passé derrière le présent
Lui qui demandait l’hospitalité spirituelle
Il n’eut que l’hospitalisation d’une lobotomie sans frais
Gracieuseté du quotidien affamé d’innocence

En partance des Îles faites d’os blanchis
Il oublie ses couteaux qui attendent ses dents jaunies
Couteaux reflétant la lumière du néant
Habitué à danser avec les grandes constellations minées

Sur un fond d’azur
La peau fond sur un pot
Lorsque Ben Hure sur son char
Renverse le sablier cassé des corneilles
Celles qui valsent sous le pavillon fluide
Les secondes qui passent et leurrent le temps
Symbolisent la castration du ciel
Mais Philémon est déjà trop loin
Pour s’en apercevoir à temps

6 mars 2002

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